« Non pas rassembler la gauche, mais fédérer le
peuple »
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Le peuple et la démocratie du même pas
« La peur doit
changer de camp »,
a annoncé sous les applaudissements le dirigeant de Podemos, Inigo Errejon. La
peur comme instrument de contention, c’est une arme utilisée aujourd’hui par
l’oligarchie pour contraindre les peuples à accepter la précarité, le chômage,
des perspectives de misère à perte de vue… Mais on sait aussi que les droits
des peuples ont été arrachés par la peur qu’ils inspiraient aux classes
possédantes. « Pour qu’on puisse reconstruire le pays, les riches doivent
avoir peur du peuple. » Le moyen de la susciter est imparable. Il suffit
que le peuple décide de s’occuper de ses propres affaires. Podemos fait du
peuple, de son affirmation un processus de construction politique. Le peuple
n’est pas une donnée préalable ou ethnique. Il se constitue dans et par
l’exercice de la démocratie.
De quoi apporter de
l’eau au moulin du dernier débat des Remue-Méninges 2014, dont le thème est
« Qu’ils s’en aillent tous, vive la constituante ». Le Tunisien d’Al Qotb, Samy Ben
Chaabane, sait de quoi il retourne pour avoir été un acteur de ce mouvement
pour une constituante dans son pays. Mais en France, la nécessité d’une
nouvelle constitution est tout aussi impérieuse. Il suffit d’entendre Françoise
Martres, présidente du Syndicat de la magistrature qui fait le constat d’une
justice qui échappe au citoyen. Ou bien Mathilde Morachinni qui a étudié
soigneusement les très en vogue PPP (Partenariat-Public-Privé), structures très
propices à la corruption sous toutes ses formes pour en tirer une conclusion
claire et nette, par la bouche de Raquel Garrido qui anime le débat :
« nous ne sommes pas en république. » Et ce n’est pas forcément
l’attente populaire qui fait défaut. Elisa Martin du PG qui a porté avec
l’écologiste Eric Piolle une liste citoyenne qui a remporté les municipales à
Grenoble aime à le souligner. La recette de la victoire n’a pas été si
compliquée : « un programme d’intérêt général et une forte
implication populaire. »
Alors quoi ? « Le problème, ce n’est pas
de rassembler la gauche, c’est de fédérer le peuple qui se désintéresse
aujourd’hui aussi bien de la gauche que de la droite », explique
Jean-Luc Mélenchon dont l’intervention clôt l’université d’été 2014. Il prendra
quelques minutes pour s’amuser du feuilleton médiatique de l’été qui l’a fait
démissionnaire, à la retraite ou/et selon les variantes, dépressif mais revient
vite au cœur du problème. Les dernières élections ont montré
« l’insurrection froide » de l’électorat qui s’est abstenu à la
proportion inimaginable de 60% de tout suffrage. Comment dans ces conditions
d’une telle « grève civique » envisager de vouloir rassembler une
gauche si massivement désavouée.
A juste titre car comme le
rappelle l’orateur, la politique austéritaire de François Hollande, c’est 90
milliards d’euros de cadeaux aux patrons, sans contrepartie, payés par les
citoyens, sous la forme d’impôts (directs et TVA), de coupes budgétaires, de
suppression de services publics… Un scandale qui se mesure par l’augmentation
de 30% des revenus des grands patrons et des dividendes et par le fléchissement
et le recul des investissements dans les entreprises…
« Il faut donc
changer la règle du jeu. »
La 5e République, dont la constitution a déjà été amendée près d’une vingtaine
de fois depuis 1958 et dans l’ensemble sans que le peuple ait eu son mot à
dire, est à bout de souffle, les présidences Sarkozy et Hollande, à la fois
pathétiques et brutales, l’attestent. Mais une participation populaire massive
s’avère indispensable. Il faut convaincre « le peuple français de se mêler
de cette affaire ».
L’urgence est là de
répondre à des politiques économiques et écologiques totalement irresponsables. « La dette ne sera jamais
remboursée », insiste Jean-Luc Mélenchon. Les intérêts l’alimentent sans
cesse et les sacrifices réclamés par les orientations austéritaires sont vains.
Le peuple n’a que la misère, la souffrance à en attendre. L’affaire ne s’arrête
pas à la voracité, à la cupidité élevée au rang de principe supérieur, elle
inclut la myopie et l’inconscience. Les mesures écologiques minimums que les
gouvernants devraient prendre de toute urgence sont repoussées aux calendes
grecques quand elles ne sont pas posées elles aussi sur le tapis du casino
(vente et achat de droits de polluer !).
Il faut donc changer la règle, en imaginer et en
rédiger une nouvelle. « C’est au peuple de décider » et il
n’y a pas que le Parti de Gauche qui le pense. « Il s’agit donc de le
mettre en action. » Ce mouvement qu’il faut impulser dépasse les partis.
« Nous allons nous inspirer des expériences de nos camarades espagnols. En
2017, ce ne sera pas une élection mais une insurrection : nous avons un
candidat qui est la 6e République. » La constituante devra conjuguer la
stabilité des institutions et veiller à garantir l’initiative et la
souveraineté populaire avec vraisemblablement la possibilité d’un référendum
révocatoire. Pour que le pouvoir vienne du peuple et lui reste.
« Le système a peur du peuple. Nous allons le mettre en mouvement. »
« Le système a peur du peuple. Nous allons le mettre en mouvement. »
Jean-Luc Bertet
Jean-Luc Bertet
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